Les mesures visant à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes sont actées, dans le privé comme dans le public. De quoi nourrir le dialogue social en entreprise et dans les administrations.
L’égalité professionnelle est peut-être l’un des rares sujets sur lesquels les organisations syndicales et le gouvernement ont réussi à mener un dialogue fructueux, aboutissant à des mesures concrètes tant dans le privé que dans la fonction publique. Du côté du privé, la mesure phare du volet égalité professionnelle intégré à la loi Avenir professionnel est l’obligation faite aux entreprises de mesurer les écarts salariaux et de les corriger dans un délai de trois ans. L’index de mesure des écarts a été précisé par décret au début janvier. Les entreprises seront notées sur une échelle de 100 points selon cinq critères : les rémunérations, le retour de congé maternité, les augmentations, les promotions et le poids des femmes parmi les plus gros salaires.
Une garantie de transparence
Pour échapper à toute pénalité (pouvant atteindre 1 % de la masse salariale), l’entreprise devra cumuler au moins 75 points sur 100. Elle est également tenue de publier la note obtenue sur son site internet et de communiquer au comité social et économique (CSE) les éléments qui la composent. La CFDT, qui a obtenu que le salaire de référence retenu pour calculer les écarts intègre les primes et les bonus, se félicite du caractère contraignant du dispositif et de la transparence désormais garantie.
Avec quelques bémols sur le seuil de 75 points jugé un peu bas, et sur le délai de trois ans, qui peut être prolongé d’un an dans certains cas. « Le dispositif ne suffira pas à résoudre toutes les discriminations salariales entre les femmes et les hommes, mais il constitue une avancée notable, se réjouissait cependant la secrétaire nationale Béatrice Lestic peu après la publication du décret. Le passage d’une obligation de moyens à une obligation de résultat répond à une revendication de longue date de notre organisation. »
C’est à la mise en œuvre de ces mesures que les équipes CFDT en entreprise vont s’atteler dès maintenant. Les entreprises de plus de 1 000 salariés devront en effet publier la note obtenue à l’index égalité professionnelle au plus tard le 1er mars 2019 (le 1er septembre pour les entreprises de 250 à 1 000 salariés, le 1er mars 2020 pour toutes les entreprises.) « Les instances représentatives du personnel doivent être consultées en amont car les éléments pris en compte afin de calculer les écarts salariaux relèvent du dialogue social », alerte Dominique Marchal, déléguée femmes CFDT.
Concrètement, il s’agit de comparer les rémunérations moyennes des femmes et des hommes par tranches d’âge et catégories de postes équivalents. Soit en fonction des catégories socioprofessionnelles, soit (après avis du CSE) par niveaux ou coefficients hiérarchiques, selon la classification de branche. « L’objectif est de choisir la méthode qui permet d’analyser le plus finement possible les écarts salariaux », indique Dominique Marchal. Ces éléments d’informations seront utiles pour la suite. Un groupe de travail paritaire, auquel participe le conseil supérieur à l’égalité professionnelle, a été mis en place par le ministère afin d’assurer un suivi à la fois politique et technique du dispositif. Dès janvier 2020, le calcul de l’index visant à mesurer les écarts de rémunération entre les hommes et les femmes au sein de l’entreprise pourrait être automatisé dans le logiciel de paye.
Vers un plan d’action pour tous les agents
Du côté de la fonction publique, les travaux sont également en cours. Après une phase d’intenses négociations, l’accord paraphé à la fin novembre par la CFDT et cinq autres syndicats (ni la CGT ni FO ne l’ont signé, Sud s’est rallié à la fin décembre) sera bel et bien appliqué, sauvé in extremis à la faveur des résultats des élections de décembre 2018. L’année 2019 marque donc la phase de mise en œuvre. Un comité de suivi de l’accord, composé des seules organisations signataires, s’est réuni la première fois le 29 janvier en présence du secrétaire d’État Olivier Dussopt. « Nous avons senti une vraie volonté de mettre en œuvre et de respecter tous les termes de l’accord, salue Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT-Fonctions publiques. Certaines mesures seront intégrées au prochain projet de loi sur la fonction publique, d’autres sont d’ordre réglementaire. »
La principale disposition concerne l’obligation pour l’employeur public de mettre en place dans un délai de trois ans, un plan d’action issu d’une négociation avec les IRP ou, a minima, d’une concertation. « Les équipes doivent faire de ces plans d’action un outil pour faire avancer l’égalité professionnelle sur leur lieu de travail », souligne Mylène Jacquot. Comme dans le privé, les employeurs publics s’exposent à une pénalité de 1% de la masse salariale en cas de non-respect de leurs nouvelles obligations.
La CFDT reste mobilisée pour que tous les agents, y compris ceux des petites collectivités ou des petits établissements, soient couverts par un plan d’action. La méthode de mesure des écarts salariaux fera l’objet d’une prochaine concertation, pour une mise en œuvre courant 2019. Autre élément déterminant permettant de lever les freins à la progression de carrière, la part des femmes parmi les agents « promouvables » et les agents promus sera rendue publique, sans remise en cause de la compétence des commissions administratives paritaires en matière de promotion. Le secrétaire d’État a également confirmé que le fonds pour l’égalité professionnelle prévu par l’accord (alimenté par les pénalités payées par les employeurs) ne se limiterait pas à la seule fonction publique d’État et s’étendrait à l’hospitalière et à la territoriale. Les signataires participeront au choix des projets en faveur de l’égalité professionnelle financés par ce fonds. À la demande de la CFDT, le comité de suivi se réunira trois fois cette année et veillera à la mise en œuvre effective de tous les termes de l’accord. Dans le privé comme dans le public, l’année 2019 s’annonce décisive.
photo © J Faure /Réa
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