mardi 26 août 2014

[Interview] “L’échéance pour la CFDT n’est pas 2017 !”

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Au lendemain de l'annonce de la démission du gouvernement Valls, Laurent Berger, dans une longue interview au Parisien/Aujourd’hui en France, réaffirme que pour la CFDT la priorité est encore et toujours la lutte contre le chômage.
Crise économique, politique... C’est la rentrée de toutes les tempêtes. La réponse d’un gouvernemental vous semble-t-elle à la hauteur ?

Cette crise politique, c’est d’abord l’absence de responsabilité des uns et des autres. Pour la CFDT, l’échéance n’est pas l’élection présidentielle de 2017 ! Notre cap et notre seul camp, ce sont les salariés et les chômeurs. Au moment où il y a une grave crise économique, sociale et citoyenne, on ne parle dans cette rentrée que de remaniement, de posture des uns et des autres, de leur amertume. Mais il y a 5 millions de chômeurs, des entreprises en grande difficulté, des salariés en souffrance. C’est de cela que les gens ont envie qu’on parle. Ils attendent des solutions.

François Hollande maintient le cap économique. Est-ce le bon choix ?

La CFDT a déjà dit que le rythme de la réduction des déficits publics devait être revu. Il est trop brutal et pèse sur le financement des politiques de solidarité dont les gens ont fortement besoin. Cela pénalise aussi les services publics et aggrave la situation des fonctionnaires qui sont au bord de l’explosion. Sans parler de l’investissement public qui est aujourd’hui au point mort.

Vous êtes donc d’accord avec les critiques d’une partie de la gauche...

Je me fiche d’être d’accord, ou pas. Ce n’est pas mon rôle. La vraie question à mes yeux est : comment arrêter d’être dans le commentaire pour être dans l’action et répondre aux vraies questions. C’est cela l’enjeu de la politique. Ces querelles à gauche, comme à droite d’ailleurs, passent au-dessus de la tête des gens. Que pense un salarié qui a perdu son boulot ou un jeune sorti en juin de l’école qui se retrouve au chômage quand il voit s’écharper la classe politique ?

Quelle doit être la priorité du nouveau gouvernement ?

Accélérer tout ce qui permet de créer de l’emploi. D’abord, il faut aider les gens les plus en difficulté, multiplier les contrats aidés et toutes les possibilités de formation pour les chômeurs. Il y a 500 000 personnes de plus au chômage depuis deux ans, Du jamais-vu. Il faut aussi mettre en place au plus vite la garantie jeunes décidée lors de la conférence sociale et prendre des mesures beaucoup plus fortes en direction des moins de 25 ans, notamment par le biais de l’apprentissage. Il faut aussi agir sur les entreprises en péril comme Gad. L’État doit convaincre le repreneur pour éviter les licenciements.

Comme le faisait le ministre Montebourg ?

Oui, il a fait le boulot. Mais ce n’est pas le sujet. Il faut répondre aux préoccupations des gens. Si on ne le fait pas, c’est notre démocratie qui est mise en danger.

Qu’attendez-vous du discours de Manuel Valls à l’université d’été du Medef, demain ?

Qu’il fixe des limites au patronat. Ça ne peut pas être toujours plus ! Le 10 septembre, syndicats et patronat ont rendez-vous pour un bilan d’étape des négociations lancées dans les branches sur les contreparties prévues en termes d’investissement et d’emplois dans le pacte de responsabilité. Le gouvernement doit fixer une date limite pour que ces négociations aboutissent. Et dire haut et fort au patronat qu’en cas d’échec il remettra en cause les allègements de charges prévus en 2016 et 2017.

La CFDT est le seul syndicat à soutenir le pacte de responsabilité. Vous persistez ?

Nous sommes d’accord avec les aides aux entreprises prévues dans le pacte de responsabilité pour soutenir l’emploi, la formation et l’investissement. C’est l’intérêt des salariés. Mais il faut que chacun tienne ses engagements. La CFDT l’a fait ! Au patronat de tenir les siens.

Les mesures sur le pouvoir d’achat annoncées par François Hollande sont-elles suffisantes ?

La fusion entre le RSA et la prime pour l’emploi est une bonne chose. La CFDT ainsi que toutes les associations de lutte contre la pauvreté le réclament depuis longtemps. Mais cela ne suffit pas. On attendait une vraie réforme fiscale qui aurait permis un impôt plus juste et plus redistributif. Elle n’est pas venue. C’est une erreur de cette majorité, mais il n’est pas trop tard.

Le chef de l’État a annoncé une remise en cause des seuils sociaux dans les entreprises...

Si le problème de la croissance était lié au fait d’avoir un délégué du personnel à partir de onze salariés, cela se saurait ! Des études montrent que le gain à espérer en termes d’emplois est extrêmement faible.

Etes-vous favorable à une journée d’action à la rentrée ?

La mobilisation de cette rentrée doit se faire dans les entreprises et les administrations.
Propos recueillis par Catherine Gasté

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