Le
4 décembre 2014, tous les agents et contractuels des fonctions
publiques d'Etat, territoriale et hospitalière désigneront leurs
représentants.
Engagée
dans cette course, toute la CFDT – qu’il s’agisse des militants de
terrain, des syndicats, des fédérations, des unions régionales ou de la
Confédération – a pris soin de gérer l’effort sur la durée. Les semaines
à venir vont en effet être cruciales. Une échéance se profile avant
même le scrutin : celle du 22 octobre, date butoir de dépôt des listes
– excepté pour la Justice, où la date est fixée au 22 septembre. « Il faut encore mettre le paquet, admet Éric Bercker, de la Fédération CFDT des finances, y compris à la DGFiP [direction générale des finances publiques], qui représente 70 de nos adhérents. »
L’appui du réseau CFDT
Idem à la Fédération santé-sociaux, où l’on reconnaît être encore « concentré sur les listes ». L’effort ne se relâche pas non plus au Sgen (Éducation nationale, enseignement supérieur, recherche) : « Constituer
2 000 listes, pour lesquelles il fallait trouver entre 15 000 et
18 000 candidats, représentait un véritable challenge », indique Franck Loureiro. Pour éviter de réitérer l’expérience de 2011, « où il nous avait manqué 321 listes »,
le Sgen a choisi de faire appel aux unions régionales et de s’appuyer
sur leur réseau. Partant de l’idée que de nombreux adhérents, tous
secteurs confondus, peuvent avoir une compagne ou un compagnon
enseignant (susceptible d’adhérer et de se présenter sur une liste
Sgen), la fédération a sollicité leur concours formellement. Parfois
même sous forme de convention de partenariat. « Cela a déclenché un véritable travail interprofessionnel », souligne Franck Loureiro, citant l’exemple de l’Alsace, où l’union régionale a « prêté sa caravane pour circuler dans les écoles. Nos équipes se sentent moins isolées, cela crée une dynamique ».
Grâce à cette mobilisation, le nombre de listes constituées est en
passe de dépasser celui de 2011. Dans les départements d’outre-mer, une
attention particulière a été portée à la création de listes avec des
candidats locaux et éviter la prééminence des expatriés – une
préoccupation partagée par l’ensemble des fédérations.
Le vote des cadres, un enjeu déterminant
« Le
vote cadre dans les fonctions publiques est un enjeu important pour la
CFDT. Mais, au-delà, il est capital que nous fassions en sorte que la
CFDT soit encore plus attrayante aux yeux des cadres. » Jean-Paul Bouchet, secrétaire général de la CFDT-Cadres, a posé les enjeux en ouverture de la table ronde coorganisée le 10 septembre avec l’Uffa-CFDT. La secrétaire générale de la CFDT-Fonctions publiques met en garde : « Si
on peut se réjouir que la CFDT soit la première organisation syndicale
chez les cadres de la fonction publique d’État, il ne faut pas oublier
qu’un tiers des voix cédétistes viennent des cadres d’Orange qui ont
choisi de rester fonctionnaires au début des années 2000. » Un
réservoir de voix appelé à disparaître du fait du changement de statut
de l’entreprise, qui n’embauche plus que sous contrats de droit privé.
De même, « dans la fonction publique territoriale, la CFDT est
largement majoritaire chez les cadres… qui ne représentent que 10 % des
effectifs ». Concernant la fonction publique hospitalière, le
scrutin du 4 décembre prendra une forme inédite : pour la première fois,
le vote se déroulera dans un collègue unique. D’où, explique Nathalie
Canieux, secrétaire générale de la Fédération santé-sociaux, « le
gros travail de la fédération, en lien avec la CFDT-Cadres, pour
encourager nos équipes à faire une place aux cadres sur les listes ». L’enjeu est d’autant plus important que la CFDT talonne la CGT dans le vote cadre à l’hôpital.
Laurent Berger a quant à lui insisté sur la nécessité d’aller au contact des agents, de tous les agents, pour échanger avec eux sur leur métier, dans un contexte « où la fonction publique doit évoluer pour ne pas aller dans le mur ». Une situation que les cadres de catégorie A comprennent mieux que quiconque du fait de leur situation, parfois synonyme de souffrance, entre des agents déboussolés et une administration trop rigide. C’est pourquoi il faut les « associer au changement, en leur redonnant des marges de manœuvre ». |
D’une
manière générale, les équipes n’ont pas ménagé leur peine durant cette
première phase de campagne, dont le bilan, établi par les représentants
fédéraux lors d’une réunion le 11 septembre à la Confédération, se
révèle largement positif. Les tournées, notamment la tournée
confédérale, à laquelle ont participé le secrétaire général et les
secrétaires nationaux, ont été très appréciées. « Ça rebooste ! », indique Éric Bercker. Même écho à la Fédération santé-sociaux,
qui n’a pas fait relâche cet été, en organisant une seconde tournée
dans toutes les unions professionnelles régionales avec pour slogan : « La CFDT est près de vous, même l’été. » À cela se sont ajoutées des initiatives originales (concerts, cafés gourmands), qui ont donné l’occasion d’échanges, « dans un autre style de militantisme. On engage la question des conditions de travail différemment »,
souligne la responsable fédérale Santé-sociaux Liliane Dassis. La
diffusion du carton réponse « Une carte, une idée ! », devant permettre
de remonter des propositions des agents sur leurs conditions de travail,
a été large. L’outil a été très utile localement, « aidant les syndicats à construire leur campagne », souligne Marie-Odile Esch, secrétaire générale d’Interco. Il a « servi de sésame, permettant d’engager un échange en direct »,
ajoute Franck Loureiro. Les fédérations ont aussi construit leurs
propres outils visant à nouer des contacts avec les agents : diffusion
de guides (comme pour Interco ou la CFDT-Défense, qui a édité un Parcours du votant)
mais aussi réalisation d’enquêtes (sur l’égalité professionnelle aux
Finances, auprès des personnels non enseignants et des enseignants du
premier degré pour le Sgen…), dont la restitution a permis de créer du
lien avec les individus.
Un « manque d’appétit »
Si
la mobilisation est au rendez-vous, le pari du 4 décembre n’est pas
encore gagné. Résumant bien la tonalité générale, Francis Moreau, de la
Fédération formation et enseignement privé (Fep), explique : « Je suis à la fois confiant et inquiet. Confiant dans les équipes, mais inquiet des résultats du vote. » S’il craint les « bugs numériques » (visiblement, les compteurs du ministère sur le nombre de listes ne sont pas encore au point), il appréhende surtout « un manque d’appétit des personnels pour aller voter ». Dans les établissements hospitaliers, « le
climat de tension, lié à la pression mise sur les agents, et les
difficultés au quotidien font passer la campagne au second plan »,
note Liliane Dassis. Ce risque – le désintérêt, conduisant à
l’abstention – mais aussi la défiance vis-à-vis des organisations
syndicales avaient déjà été pointés dans l’enquête effectuée par TNS
Sofres au printemps dernier. La question du gel du point d’indice et du
pouvoir d’achat focalisent davantage les préoccupations des agents que
l’élection. « Les agents nous renvoient le fait que cela ne changera rien d’aller voter, indique Franck Loureiro. À nous de les convaincre que ce n’est pas en votant pour celui qui crie le plus fort que cela portera le plus de résultats. »
Faire bouger l’action publique
Mais
pas question de céder au fatalisme ! Ces prochaines semaines seront
décisives pour toucher les abstentionnistes, et porter haut les couleurs
de la CFDT. Toute l’organisation se prépare dans cette dernière ligne
droite. Le Sgen a dépensé une grande énergie dans la réalisation d’une
campagne digitale imaginative pour continuer à mobiliser et convaincre
de l’importance d’aller voter CFDT : site internet, relais d’« ambassadeurs »
(des adhérents actifs sur les réseaux sociaux) et repérage de blogueurs
professionnels afin de diffuser largement les idées et messages de la
fédération… La Confédération prévoit de son côté de « faire le buzz »
grâce à une vidéo humoristique sur le web et les réseaux sociaux. Le
secrétaire général, Laurent Berger, contribuera également, par des
billets réguliers sur son blog, à évoquer la situation des agents. Tout
l’enjeu est là : gagner des voix, oui, mais pour arriver à gagner les
moyens du changement. Et, au final, précise Jocelyne Cabanal, secrétaire
nationale, « faire bouger l’action publique ».